On remplace par ça tous les manuels de super futurs parents!

« Une « bonne mère » ne peut pas, aujourd’hui, être seulement une « mère ». Cela signifie que lorsque cette mère a par exemple une activité professionnelle ou vit une relation conjugale, elle peut être non seulement mère mais qu’elle a de bonnes chances de l’être aussi bien, voire mieux qu’une femme centrée sur son rôle de mère. L’enfant est lui-même mieux si sa mère n’est pas que mère. C’est dans la distance au rôle maternel qu’il observe qu’il peut apprendre à se séparer, en ayant plus aisément un espace personnel. Il a besoin pour devenir lui-même un individu indépendant et autonome d’une ou de plusieurs personnes proches qui soient ainsi, et donc qui ne se consacrent pas entièrement à lui. C’est pourquoi les politiques qui proposent un financement pour que les « parents » – en réalité les mères – restent à la maison pour élever leur enfant méritent d’être interrogées. Avoir un parent à temps plein correspond-il aujourd’hui à l’intérêt de l’enfant ? On peut en douter avec les dérives possibles de mère trop mère. Aussi important soit-il, l’enfant ne devrait être idéalement ni au centre, ni à la périphérie de ses parents, ni surinvesti, ni négligé. A certains moments, l’enfant doit être l’objet d’une attention exclusive, mais à d’autres il doit comprendre que le proche a autre chose à faire, et vaquer à ses occupations avec le soutien d’autres personnes. C’est pourquoi on peut s’étonner de certains discours sur l’enfant aujourd’hui : il n’est ni roi ni délaissé, dans la très grande majorité des cas. Il peut être roi à certaines heures, et à d’autres confié à d’autres éducateurs ; il n’est pas défini exclusivement en tant que fils de ou fille de. L’alternance de la garde et des soins lui fait changer d’identité. Il apprend ainsi la fluidité, et progressivement le fait d’être indépendant et autonome. »

(François De Singly, « Les uns avec les autres. Quand l’individualisme crée du lien »)