Les Suisses et LANORMALITE

Les Suisses et LANORMALITE

Lors du 19h30 du 9 décembre 2015, Bernard Rappaz s’est servi de la grille de LANORMALITE pour commenter l’élection au Conseil fédéral de l’UDC Guy Parmelin :

« On connaît la passion des Suisses pour l’équilibre, la modestie et la normalité. Et on a envie de dire aujourd’hui que c’est le triomphe de cette normalité. A la fois un retour à la normalité du côté du système politique puisqu’il y a désormais deux conseillers fédéraux UDC. Normal, au fond, c’est le plus grand parti de Suisse. Et puis l’élection d’un homme normal. Non pas un consultant de taille mondiale, non pas un populiste qui dérange, mais un homme normal, qui a su séduire. Et au fond, cette élection ne va peut-être pas électriser les foules, mais elle est cohérente avec un système politique qui n’aime pas ce qui est « hors norme », qui n’aime pas les têtes qui dépassent. »

Le rédacteur en chef de l’actualité RTS explique que cette analyse est née de son observation du déroulement de la journée d’élection : « Cette journée a été révélatrice de ce qui se passe dans notre pays : on ne prend pas une tête qui dépasse, on essaie de laisser de côté celui qui exagère, côté populisme notamment. Et on se met d’accord sur le profil qui a priori sera le plus consensuel, le moins dérangeant pour tout le monde, en d’autres termes le plus « normal ». C’est un scénario du retour au normal qui s’est déroulé, fondé sur une envie, partagée par la plupart des partis, de revenir à des règles raisonnables ». Bernard Rappaz relève un paradoxe relatif à la réception de ce scénario : « D’un côté, j’ai le sentiment qu’il y a dans ce pays une passion pour des attitudes politiques normales. D’un autre côté, les spectateurs peuvent être fascinés par la politique française « spectaculaire ». Mais après avoir suivi des débats français, ils reviennent sur les chaînes suisses et célèbrent avec plaisir nos politiciens normaux. Quand on analyse nos focus-groupes, on constate que des interventions de politiciens comme Sarkozy, Hollande dans une moindre mesure, ou Mitterrand, ont toujours fait un triomphe. Mais lorsqu’on interroge les spectateurs, ils nous enjoignent d’éviter de faire « comme les français », arguant que débattre de manière forte n’est pas pour eux. » Bernard Rappaz explique ce paradoxe par une conscience du « petit miracle helvétique » et de sa fragilité : « On a peur de modifier un rouage rôdé. On ne veut pas prendre le risque de dérégler la machine, en important par exemple des comportements politiques différents ». Mais pour Bernard Rappaz, ce n’est pas aussi tranché que cela : « Certains politiciens peuvent être détestés, mais très regardés. La politique spectacle est à la fois un repoussoir et une fascination : c’est un peu schizophrénique, les spectateurs regardent, mais quand ils rendent compte de leurs impressions, ils s’élèvent contre l’idée que la politique suisse, et sa médiatisation, s’alignent sur cette tendance ». Les médias se voient ainsi pris dans une double contrainte : « On nous accuse d’être les véhicules de la normalité, et de ne pas montrer des facettes plus excentriques du pays, mais simultanément, on nous accuse d’en saboter les équilibres. On est donc en permanence dans un double standard ».

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